La Bataille de Punta Stilo (9 juillet 1940)

Le croiseur Italien Zara ouvrant le feu lors de la bataille. ( Image Wikipedia ).

Alors que la bataille d'Angleterre était à peine achevée, les regards du monde se tournèrent vers la méditerranée ou Le Duce entamait une série campagnes destinées à la fois à prouver les capacités de l'armée Italienne, et à annexer l'Albanie et la Grêce, mais aussi en Afrique du Nord à entamer une offensive destinée à terme à s'emparer de l'Egypte et du canal de suez, privant la Grande-Bretagne de cet accés vital à son empire colonial à l'est. C'est en vue de garantir le ravitaillement de ses armées en Libye afin de préparer ces offensives que la marine Italienne commença ses opérations.

La Marine Française étant désormais hors-jeu du fait de l'armistice et des attaques de neutralisation par la marine Britannique ( Voir Mers-el-Kébir ), la Royal navy et la Regia marina se retrouvaient face à face. Dans ce long duel qui allait trouver sa conclusion en novembre 1943, la première rencontre eut lieu le 9 juillet 1940 au large de Punta Stilo, dite aussi bataille de Calabre, menée sur le cap terminant la "botte" italienne. A cet moment, la Royal Navy comptait en méditerranée une flotte principale basée à Gibraltar, verrouillant le passage à l'atlantique, et une escadre à Alexandrie, protégeant le canal de suez, unique passage vers l'océan indien via la mer rouge. Un troisième verrou était posé au sud de l'Italie, Malte, avec la base navale de La Valette. Les Italiens avaient cependant l'avantage numérique et technique, les Britanniques avaient en effet relégué pour la flotte de la méditerranée leurs cuirassés vétérans de la classe Queen Elisabeth ( QE, Valiant, Barham ), le Malaya et le Warspite étant affectés à la home fleet de même que les plus modernes de ses bâtiments, les deux Nelson, les croiseurs de bataille, le King Georges V, et le gros des cuirassés de la classe Resolution. Seule carte maîtresse aux mains de l'amiral Cunningham, ses porte-avions, dont étaient dépourvus l'Italie. Cette dernière possédait autour de l'Italie quantité de bases mais aucune coordination entre la marine et l'aviation.

Au moment ou commence ce premier affrontement, le HMS Warspite, après ses exploits en Norvège, venait d'être envoyé renforcer la flotte de la méditerranée, de même que le Malaya et le Royal Sovereign. Cunningham pouvait donc compter sur six bâtiments de ligne pour contrer les deux cuirassés rapides classe Littorio et les quatre Guilio Cesare et Duilio. Il disposait en outre de l'HMS Illustrious, HMS Formidable, du HMS Eagle, du HMS Furious.

Forces Britanniques   Forces Italiennes  
Amiraux J. Tovey, A. Cunningham   Vice-amiral I. Campioni  
3 2
1   0
5 14
15 25

Le prologue de cette bataille fut le départ de naples le 6 juillet d'un convoi de ravitaillement de Benghazi par quatre cargos escorté par 8 destroyers et 4 torpilleurs. Ce dernier entama un mouvement destiné à faire croire à la Royal Navy que sa destination était Tripoli. De son côté l'amirauté fit appareiller d'Alexandrie un convoi destiné à renforcer Malte, depuis Alexandrie. Les Italiens déployèrent alors deux escadres comprenant le gros de la flotte Italienne, avec d'un côté une force comprenant 6 croiseurs lourds, dont les quatre Zara et les Trento et Bolzano, et 12 destroyers, partis de Tarente et suivant à 35 km à l'est le convoi. Finalement cette escadre fut renforcée de l'autre escadre, comprenant deux cuirassés, le Guilio Cesare et le Conte di Cavour, 8 croiseurs légers, les Duca d'Aosta, Eugenio di Savoia, Muzio Attendolo, Raimondo Montecuccoli, A. di Barbiano, A. di Giussano, Duca degli Abruzzi, Garibaldi, et 13 destroyers. Les deux escadres aux ordres du vice-amiral Inigo Campioni fusionnèrent et convergèrent vers le convoi.

De son côté, le convoi Britannique était séparé en deux groupes de cargos de vitesses différentes ( 9 noeuds et 13 noeuds ) accompagnés par trois escadres, l'une comprenant 5 croiseurs légers et un destroyer, l'autre le cuirassé HMS Warspite et 5 destroyers, et enfin la dernière comprenant l'ensemble de la flotte d'Alexandrie avec les cuirassés Malaya et Royal Sovereign, le porte-avions Eagle, et 10 destroyers. Dans la nuit du 8 au 9, des destroyers Italiens interceptèrent un message de la RN et envisagèrent d'intercepter la flotte au large de la Calabre. Toutefois, trois destroyers et deux croiseurs quittèrent la formation pour se ravitailler et régler des problèmes de machines, l'escadre recevant des destroyers de renfort venant de Tarente. L'escadre du premier convoi Britannique fut repérée et attaquée la vaille au soir par une escadrille de bombardiers Sparviero et le croiseur HMS Gloucester touché par un coup direct à la passerelle, tuant le commandant et son état-major, privant le bâtiment de ses capacités de visée. A ce stade, les Italiens croyaient avoir provoqués des pertes bien supérieures.

Le 9 juillet au matin, vers 9 heures, l'escadre de tête de Cunningham, comprenant le Warspite et des destroyers, n'était plus qu'à 90 milles de la flotte Italienne. Il décida de ralentir son allure pour attendre le second convoi mieux défendu. A 13 heures, les Fairey Swordfish du HMS Eagle étaient à portée, et lancèrent une attaque contre les croiseurs Italiens sans succés. A 15h15, les deux flottes étaient au contact visuel et arrivaient à portée de tir. Le Warspite avait été rejoint par les croiseurs qui formaient écran devant lui. Les trois cuirassés étaient très séparés mais les croiseurs proches, et un duel d'artillerie commença à 21 500 mètres, qui sembla tourner rapidement à l'avantage des Italiens dont les télémètres étaient plus précis. Mais l'expérience des canonniers Britanniques fit la différence et rapidement, il purant augmenter leur cadence de salve. Les tirs Italiens arrivaient toutefois à encadrer de très près les croiseurs de l'amiral John Tovey, qui décida, en commun accord avec Cunningham sur le Warspite, de rompre le combat, au moment d'un impact du Garibaldi sur le Neptune. A 15h30, ces croiseurs s'étaient dégagés, laissant la place aux cuirassés:

Le Warspite encardra de très près les deux croiseurs Barbiano et Giussano, mais sans impacts directs, les Anglais tirant trop court. Cuningham fit arrêter les machines du Warspite pour lui laisser le temps d'être rejoint par le Malaya, le Royal Sovereign étant encore loin derrière. L'amiral Campioni retira ses croiseurs et avança ses cuirassés afin d'entamer un duel d'artillerie à 26 500 mètres. Mais seul le Giulio Cesare ouvrit le feu, le Cavour estant en observateur selon le principe de réglage d'artillerie tiré des leçons de la bataille du Jutland, lorsque plusieurs navires encadrent la même cible, lorsque l'on doit déterminer à qui appartiennent les impacts. Il fut finalement dirigé contre le Cavour tandis que le Cesare se concentra sur la Warspite. Le HMS Hereward, destroyer escortant le Warspite fut gravement "secoué" par un impact trop long du Cesare. Les quatre croiseurs lourds Italiens de la classe Zara commencèrent alors à ouvrir le feu à leur tour sur le Warspite, mais durent se replier avec le retour des croiseurs Britanniques de Tovey.

Le combat tourna en un duel serré entre le Warspite et le Cesare. Ce dernier parvint presque à toucher le warspite, sa dernière salve inondant ses ponts et secouant sa coque. Mais ce dernier répliqua par un impact direct sur la plage arrière du Warspite, à 24 000 mètres, pénétrant dans la soute à munition des canons de 37 mm. L'incendie refoula les fumées dans le compartiment de la chaudière babord et contraint à l'évacuer. Sans personnel, ces chaudières fermées manquèrent à la puissance du navire dont la vitesse tomba à 18 noeuds. Devenu une cible plus facile, avec le Malaya et le Sovereign qui se rapprochaient dangereusement, ce dernier était en péril, bien qu'ayant sa puissance de feu intacte. Devant le danger bien réel, les destroyers lancèrent un barrage de fumée pour permettre au cuirassé de s'éclipser pendant que le Warspite attendait le Malaya. Ce dernier était désormais très bien placé pour endommager très gravement le Cesare, aussi son nouvel arrêt parut providentiel aux Italiens.

Lorsque les forces se regroupèrent, la flotte Italienne déploya ses croiseurs contre ceux des Anglais. A 15h58, la ligne de croiseurs Italiens ouvrit le feu, le Trento prenant à partie le HMS Liverpool, cependant qu'à 16h07, le Bolzano encaissa trois impacts de calibre moyen ( 152 mm ) qui endommagèrent son gouvernail, le bloquant quelques temps. Le destroyer Alfieri fut aussi touché par un impact indirect, mais les mécaniciens du Cesare annonçèrent à ce moment avoir réparé les deux chaudières endommagées, permettant au bâtiment de regagner 22 noeuds. Cependant Campioni considérant que mener une bataille à présent contre trois cuirassés et un porte-avion avec l'unique Conte di Cavour était un risque trop important à courir et décida de replier la flotte en direction de Messine, non sans avoir ordonné un dernier raid de destroyers à la torpille. Les Britanniques en firent autant, mais aucun impact ne fut noté. Vers 16h40, un raid de 126 appareils ne marqua aucun coup au but grave, bien que la flotte Britannique essuya des impacts. 50 avions attaquèrent par méprise un des bâtiments de ligne Italiens, sans dommages. La bataile cessa à 16h55, mais le landemain matin, un raid de Swordfish de l'Eagle envoya par le fond le destroyer Leone.

Ainsi s'achevait la première bataille entre la Royal Navy et la marine Italienne. Malgré des moyens considérables ( presque toutes les forces alliées et Italiennes présentes y participèrent ), il n'y eut qu'une perte attribuable aux suites de la batailles, un destroyer Italien. Le bilan était bien maigre, mais ne contraignit pas pour autant la regia marina à l'inaction totale. Il y eut d'autres approches et combats isolés avant la grande confrontation de Matapan en mars 1941.

Voir la marine Italienne

Voir la marine Britannique

 

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