Trière Grecque (500 av.J.C.)

Trière Athénienne du IVe siècle

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Trière de Thémistocle à Salamine (480 av.J.C.)

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Une trière Lagide ( 50 av. J.C. )

La Trière constitue la dernière unité lourde classique des flottes Antiques. Invention grecque, mise à profit par l'amiral Thémistocle à la bataille de Salamine où elle défit la flotte Perse de Xerxès en 480 av. J.C., la trière consistait simplement à rajouter un rameur et un banc de nage à la Dière, atteignant 170 rameurs. A peine plus large et plus longue que la Dière, mais un peu plus lourde ( environ 80 à 85 tonnes), la Trière était nettement plus rapide et dévastatrice que les Dières et surtout les Pentécontores. Unité antique très célèbre, elle à posé une véritable énigme aux historiens qui se sont demandés comment gérer la nage avec une telle disposition des rameurs. Qu'il s'agisse de Napoléon III avec la reconstitution et l'essai sur la seine d'une trière athénienne, qui ne fit que renforcer le mystère, ou de reconstitutions plus récentes, l'archéologie moderne donne sa réponse, étayée par les indices laissés par les fresques, peintures, mosaïques, bas reliefs, sculptures ou textes, la trière démontre qu'elle était tout à fait gérable en jouant sur la longueur des avirons et la condition physiques des rameurs, et relativement efficace pour l'époque.

Les reconstitutions:

Napoléon III était, on le sait, passionné comme la plupart de ses contemporains de l'époque romantique par les civilisation antiques. Ne cessant d'intriguer les historiens de l'époque, la trière constituait une véritable énigme qu'il contribua à éclaircir de ses deniers personnels. Ses essais décevants se révélant de peu d'enseignements contribuèrent au contraire à obscurcir encore ce mystère. Les seuls à ce jour à avoir tenté d'être aussi fidèles à la réalité historique furent John Morrison et John Coates, qui reconstituèrent en 1988 l'"Olympias", une trière grecque de 500 av.J.C.

Les enseignements tirés de cette expérience empirique à la Thor Eyerdhal, méritent un dossier complet. Voici donc le rapport inédit de cette expérience signé John Morrison et paru au numéro 183 (juin 1993) des dossiers de l'archéologie:

"Au cours d'une conférence internationale intentionnellement nommée "Advisory discussion" qui s'est déroulée en avril 1983 au National Maritime Museum à Greenwich, le docteur Coates et moi-même, avons proposé le projet de reconstitution d'une trière Athénienne des Ve et VIe siècles avant J.C. A la suite de cette conférence, fut créée en Grande-Bretagne le "Trireme Trust", qui fut plus tard invité par la marine de guerre Hellénique à collaborer avec elle pour construire une trière grandeur nature selon les concepts que nous avions élaborés.

Ce navire, lancé en juin 1987 au Pirée et baptisé "Olympias", fut mis en service après les épreuves techniques auxquelles il fut soumis en Août de la même année par la Marine et le trust agissant de concert. des essais ont suivi en 1988, 1990 et 1992. 1993 marquera le dixième anniversaire du début du projet. On prévoit alors de faire naviguer l'Olympias en en juin sur la Tamise, afin qu'elle participe à la célébration anglo-grecque du 2500e anniversaire de la naissance de la démocratie à Athènes. le navire attirera sur lui l'attention des savants et du public d'Europe de l'ouest. Il est donc opportun de revoir quels furent les buts de sa construction, d'examiner ce qu'il a accompli, d' évaluer ce qu'il représente aujourd'hui et de tirer des leçons de l'enseignement qu'il nous a donné.

Ce qu'est l'Olympias:

Le "trireme trust" à été fondé afin de promouvoir la construction d'une copie de trière athénienne. Le trust et la marine grecque peuvent se féliciter aujourd'hui d'avoir atteint leur objectif en réalisant l'Olympias. leur succès est cependant contesté par certains qui font remarquer que ce navire n'est pas reconstruit d'après des vestiges réels de trière antique qu'on aurait découvert sur des fonds marins. L'objection est moins admissible qu'elle ne le paraît à première vue. Tous d'abord les Trières ne coulaient pas: Lorsqu'une voie d'eau s'y déclarait, elles flottaient remplies d'eau, et ne pouvant plus naviguer, on les remorquait. Même noyées, elles avaient, comme l'Olympias, un coefficient de flottabilité positif. Construites en bois, ne comportant qu'une faible proportion de matériaux plus lourds que l'eau, la densité moyenne du bâtiment et de son contenu était donc inférieure à celle de l'eau.

Dans l'hypothèse qu'une trière ait pu, malgré tout, couler, comment un archéologue pourrait-il l'identifier sur le fond? Seuls auraient pu subsister les éléments inférieurs de la coque. Mais même en présence de vestiges nombreux, l'archéologue ne peut décider s'ils sont ceux d'une trière que d'après ce qu'il sait de descriptions faites dans la littérature et sur les inscriptions; ces dernières sont bien les seuls moyens d'identifier un vaisseau qui apparaît sur d'anciennes représentations. il n'existe qu'une exception à cela: le grafitto d'Alba Fucens sur lequel on lit navis tetreri longa ( quadrirème ou "4" ). les épaves ne portent évidemment pas d'"étiquette"; donc l'identification certaine d'une trière est impossible. Au cas ou l'une d'elles aura sombré, l'archéologue ne l'identifiera que s'il sait d'avance ce qu'il cherche.

Donc, en l'absence de trière dûment identifié, le docteur Coates et moi-même avons pensé qu'il serait raisonnable de procéder comme suit: Rassembler toutes les données relatives aux trières que nous pouvions trouver dans le langage, la littérature et les inscriptions diverses; utiliser ces données pour procéder à des identifications probables de représentations de trières; introduire les impératifs de la géométrie et de la physique pour dessiner un vaisseau qui incorpore les données du premier et du second point; et, dans la mesure du possible, construire un vaisseau suivant ce dessin, en vérifier les caractéristiques et les performances, et les comparer aux propos des auteurs antiques. Cette méthode permettrait au moins de reconnaître une trière ou sa représentation nouvellement découverte mais non accompagnée d'une inscription.

Légitimité de la reconstruction:

Les archéologues se sont posés la question de savoir si l'archéologie expérimentale, c'est à dire la reconstitution d'objets qui ne peuvent êtres qu'une copie de de leur modèle antique, était réellement ou non de l'archéologie dans l'acception stricte du terme. La mise en question du bien-fondé de la construction et de la nature de l'Olympias, nous donnent l'occasion d'exposer ici les principaux arguments en sa faveur. Les preuves, ou les évidences, de la réalité d'un artefact antique peuvent êtres directes et/ou indirectes. Parmi les premières, on distingue l'existence de vestiges réels de l'objet ou de ceux qui sont directement liés, ses représentations accompagnées d'un inscription et les attestations littéraires contemporaines qui on un rapport direct avec lui. Les preuves indirectes regroupent les figures que l'on peut reconnaître comme des images de l'artefact et, dans le cas précis des trières, les pratiques de construction navale contemporaines. En l'absence d'épaves certaines, les traces antiques qui concernent directement la trière sont d'une part les cales de Zéa (article de D. Blackman), dans le port du Pirée, construites pour abriter les trières, et d'autre part le vocabulaire et les citations dans la littérature et les inscriptions. les cales de Zéa furent aménagées au Ve siècle dans la roche calcaire pour abriter des trières et ont été restaurées au IVe siècle avant J.C. Elles ont chacune une largeur maximale légèrement inférieure à 6 mètres, bien suffisantes pour une trière. Leur longueur au niveau actuel de la mer est de 37 mètres mais I.X. Dragatzes précise qu'elles s'étendent plus loin sous l'eau dont le niveau à pu s'élever depuis le IVème siècle avant J.C. Les cales ont pu atteindre une profondeur d'environ 0.8 à 0.9 mètres sous la surface de l'eau, avec une pente peut-être plus prononcée pour permettre la mise au sec des bateaux.

En grec ancien, le terme trieres siginifie soit "(navire) trois fois équipé...", soit plus probablement "trois fois ramé". Quoiqu'il en soit, il signifie que le navire possède trois unités que d'autres bateaux ont en nombre différent. L'indice permettant de le dire est fourni par le synonyme triskalmos, employé par Eschyle en alternative pour dire trière. Ce navire possède trois Skalmoi ( tolets ) alors que d'autres en ont en nombre différent. Il existe quantité de preuves que les galères grecques les plus anciennes, avec un seul niveau de 10, 15 ou 25 rames par bord, furent plus tard armées à deux niveaux de rames afin, sans doute, d'améliorer le rapport puissance/poids et de rendre le navire plus manoeuvrable lorsque l'on se mit à utiliser des éperons pour l'abordage de l'ennemi. cette modification signifie que dans l'"espace" du rameur des anciennes galères, on devait placer deux pivots d'aviron là où il n'y en avait qu'un auparavant; l'un se trouvait donc nécessairement à un niveau différent de l'autre. A l'époque cependant, il semble que l'on ait pas éprouvé le besoin de désigner le vaisseau par le nouveau mot dieres qui n'apparaît que bien plus tard, au IIe siècle ap. J.C., peut-être traduit du latin Biremis.

Les mots triskalmos et trieres peuvent alors s'appliquer à un navire dans lequel le nombre d'avirons et de rameurs dans l'espace à été porté à trois. Cette fois, ce qui distinguait une embarcation à cinquante rames d'un bateau à 170 rames justifiait l'emploi d'un nouveau nom: triskalmos ou plus prosaïquement trieres. Ce raisonnement conduit à la très importante conclusion qu'au moins à l'époque ou Eschyle écrivit "les perses", en 473 av. J.C., l'espace du rameur était reconnu comme l'un des éléments fondamentaux d'une galère. Le nombre de rameurs dans la rangée la plus longue d'une galère est de 31, chiffre connu d'après les inscriptions. Avec une coudée dite "dorique", de 490 mm, l'espace de deux coudées, soit 980 mm détermine la longueur du navire dans sa partie équipée d'avirons; elle serait d'environ 30 mètres. Par conséquent la longueur totale du vaisseau peut s'estimer un peu inférieure à quarante mètres, ce qui lui permettrait de tenir dans les cales de Zéa, si le niveau de la mer s'est bien élevé depuis l'époque des trières athéniennes.

Les désignations pour les trois catégories de rames et de rameurs, les Thranites, Zygios et Thalamios, nous renseignent elles aussi. Toutes trois se trouvent dans les inventaires navals pour désigner les avirons, mais le premier et le dernier mot sont utilisés aussi par les historiens pour désigner les rameurs. Le mot pour désigner la cale semble être Thalamos ou thalame. Le pentécontore ( en grec pentékonteros: navire à cinquante rameurs ), avec sa seul rangée de rames par bord pouvait transporter un certain volume de charge utile. Dans l'odyssée, on lit que des cadeaux sont arrimés sous le Zyga ( banc de nage ) et Hérodote décrit les phocéens qui préfèrent l'exil à la domination perse et prennent la mer avec leurs familles et leurs biens sur leurs pentécontores. Quand fut introduit le second niveau de rames la cale fut sacrifiée pour gagner d'avantage de puissance. il est raisonnable de penser que ces rames et leurs rameurs du second niveau s'appelaient thalamioi, et que ceux du niveau supérieur, où les rameurs s'asseyaient auparavant sur les bancs de nage s'appelèrent Zigioi. Les mots Zigié et Thalamité sont des inventions byzantines erronées, qui, on le suppose, faisaient pendant à Thranites.

Depuis que le milieu du VIe siècle avant J.C. le poète Hipponax fut le premier à mentionner une trière équipée d'un éperon et de nombreux bancs de nage, celle-ci apparaît fréquemment dans la littérature. Hérodote ( 3.13.1.2 ) parle d'un navire ayant un équipage de 200 personnes qui ne pouvait être qu'une trière puisque c'est le nombre cité plus tard pour ce type de bateau, et parce qu'aucun autre type de navire de cette taille n'est signalé à l'époque. Cependant les renseignements donnés concernent ses performances de rapidité et d'agilité plutôt que les détails de sa construction. Le texte le plus important du Ve siècle av. J.C. est probablement le récit de Thucydide ( 2.93.2 ) parlant de rameurs corinthiens transférés sur des trières mégariennes de l'autre côté de l'isthme, "portant chacun son aviron, son coussin et son tolet". Ce texte permet ainsi d'infirmer que les rameurs de trières puissent avoir fait équipe de deux ou plus par aviron, ainsi qu'on l'a jadis souvent laissé entendre. D'après Thucydide ( 7.67 ) il semblerait que sur une trière, les hommes en poste sur le pont ( Katastroma ) devaient s'asseoir. Au début du Ve siècle av. J.C. il semblerait que le pont ne soit pas construit transversalement d'un coté à l'autre du navire, mais qu'il le fut plus tard afin d'embarquer un plus grand nombre de soldats. Des écrans ou des grilles de protection grées en cas de besoin devinrent un équipement de bord normal.

Un autre texte important relatif au système de rames des trières se trouve dans Aristote ( partie des animaux 687 b 18 ): parlant des doigts de la main, il dit que "il y a de bonnes raisons pour que le doigt extérieur soit court, et que celui du milieu soit long, comme la rame du milieu sur un bateau." L'auteur de "Mechanika" ( IVe siècle av. J.C., attribué à Aristote ) donne la raison de la différence de longueur des rames d'une galère. A la question de savoir pourquoi les rameurs du milieu font le plus avancer le bâtiment, il répond que cela dépend de la puissance développée par la rame comme levier: La partie de la rame la plus longue ( c'est à dire du tolet jusqu'à la poignée ) est à l'intérieur de la coque au milieu du bâtiment, là ou il est le plus large. A la proue et à la poupe, la convergence des bords ( bâbord et tribord ) oblige à raccourcir cette partie de la rame. Le médecin grec Galien fait état du même point de vue: "Toutes les rames sont projetées hors de la coque à la même distance des flancs du bateau, bien qu'elles ne soient pas de la même longueur totale". C'est un renseignement utile, comme on le verra plus loin.

Les inscriptions et les sources indirectes:

Mais les sources les plus abondantes sur les trières de la marine athénienne en général sont les inscriptions du IVème siècle: "Le décret de Thémistocle" ( IG2 1604-1632 ) et ce que nous appellerons les "inventaires navals", vers le troisième quart du IVe siècle ( 377-376 à 323-322 av. J.C. ). ces "inventaires" furent découverts au Pirée et donnent, dans un état fragmentaire, les procès-verbaux annuels du conseil sortant des superviseurs des chantiers navals. Le "décret de Thémistocle" est une inscription, qui, on le pense, reprend sous la forme littéraire du IVe siècle, le décret présenté par Thémistocle à l'assemblée Athénienne à l'automne de l'an 481 av. J.C., à savoir un "triérarque" ( capitaine ), dix "hoplites" ( fantassins ) et quatre archers sur chaque trière. Ceci est corroboré pour le pour le Ve siècle par des sources littéraires ( Thucydide 3.94.8 et 6.43 ). Le nombre modeste des défenseurs dénote d'un emploi tactique du navire, ce qui influen°a la construction du pont des trières du Ve siècle.

Les "inventaires navals" contiennent sur les trières des renseignements de grande valeur pour l'histoire. Ils décrivent l'organisation et les pratiques de la marine athénienne durant le troisième quart du IVe siècle et nous permettent de suivre l'introduction graduelle des tetreres et des penteres. ( "4" et "5" ). Sur les trières, l'information est limitée mais précieuse. Leur apport le plus intéressant concerne les postes relatifs aux avirons. Ils en désignent trois catégories: thranite, zygien et thalamien. les quantités, pour chaque bâtiment, sont invariablement de 62 thranites, 54 zygiens et 54 thalamiens ( respectivement 31, 27 et 27 rameurs sur chaque bord ), soit un total de 170 rames et rameurs. s'il on ajoute à ceux-ci les 14 hommes armés, il reste 16 homes ( sur 200 ) pour former l'hyperesia, c'est à dire le corps des assistants du triérarque. ce corps était composé de deux équipes de 5 marins ( une à la poupe, une à la proue ), et de 6 second-maîtres ( officiers subalternes ) dont les plus importants étaient l'homme de barre et l'officier de proue.

Les "inventaires" mentionnent aussi une quatrième série de rames, les perineos, c'est à dire les rames de rechange au nombre de 30 au total, qui ajoutées aux autres font un total arrondi à 200, et sont de deux longueurs différentes, 9 coudées et 9.5 coudées. depuis Thucydide ( Ve siècle avant J.C. ), jusqu'à Procope ( VIe siècle ap. J.C. ), le mot est employé également pour désigner les personnes à bord qui ne règlent pas leur passage en ramant, par opposition aux rameurs ( Proskopoi, Auteretai, Trieritai , etc. ). Puisque ces rames de 9 coudées et 9 coudées et demi sont indubitablement des pièces de rechange, mises à bord des trières pour remplacer des rames hors d'usage des trois catégories, on peut en conclure que toutes les rames devaient mesurer soit 9 coudées, soit 9 coudées et demi. La raison de la différence de longueur à été nommée plus haut et semble bonne. En calculant avec une coudée de 490 mm, on obtient une longueur de 4.41 mètres à la poupe et à la proue et 4.665 mètres au milieu du navire.

Les évidences indirectes qui concernent la trière, regroupent les pratiques de construction navale contemporaine et certaines représentations figurées du bateau. Aussi, à partir de la méthode de construction dite "coque première" qui ( l'archéologie sous-marine l'à révélé ) à été employée à l'époque pour des vaisseaux marchands, à partir aussi de l'examen des vestiges de la proue d'un navire de guerre de la fin du IIIe siècle conservés dans l'éperon d'Ahlit, on peut raisonnablement imaginer la méthode suivie pour construire une trière des Ve et IVe avant notre ère. Nous possédons aussi des images de vaisseaux de guerre à rames de cette époque représentant des trières. Deux d'entre elles sont importantes:

1. le relief Lenormant, qui montre le milieu à tribord de la coque d'un navire dont les rames sont sorties ;

2. le vase de Ruvo décoré de l'image de l'arrière d'un bateau échoué et dont les rames sont bordées mais dont on voit le gouvernail. ces objets datent de la fin du Ve siècle quand les trières étaient des navires de ligne, c'est à dire longtemps avant l'invention des tétrères et pentères dans les inventaires navals athéniens. Grâce aux sources directes, on à pu établir que les trières avaient un pont, une coque ouverte sur le flanc ( parexereisia ), ouverture par laquelle passaient les rames thranites, et plus bas deux rangées de sabords pour les avirons; les trous de la rangée inférieure étaient garnis de manchons et assez gros pour y passer la tête.

L'Olympias: Un projet pionnier:

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Les plans de l'Olympias prennent en compte les principales caractéristiques que nous venons de décrire, à savoir : Un équipage total de 200 hommes dont 170 rameurs manoeuvrant chacun une rame; trois rangs de rames par bord sur trois niveaux superposés, 31 thranites, 27 zygiens et 27 thalamiens par bord, les thranites manoeuvrant leur rame dans une ouverture longue ( parexereisia ), de la coque, les zygiens et thalamiens par des ouvertures individuelles; ouvertures du rang thalamien garnies de manchons ( askômata ); un espace pour chaque rameur de deux coudées ; des rames de même longueur à l'extérieur de la coque ; une longueur totale du bâtiment de 37 mètres, une largeur de 5,5 mètres ; un système de propulsion par rames et des détails de la structure du bâtiment basés sur les modèles illustrés sur le vase de Ruvo et le relief Nenormant ; un hypozoma installé tendu, avec un ancrage en proue et en poupe.

L'argument traditionnel contre la trière à trois niveaux que le relief Lenormant représente, était que ces trois niveaux impliquaient des longueurs de rames nettement différentes, système qu'on ne pouvait faire fonctionner de manière satisfaisante. On arguait de plus, contre ce système, qu'il impliquerait 4, 5, 6 et jusqu'à 40 niveaux de rames dans les vaisseaux de guerre développés par la suite appelés tétrères, pentères, hexères, etc..., oubliant commodément qui les nages "alla zenzile" et "a scaloccio" qui lui succédèrent ( plus d'un homme par rame ), et qui tous deux mettaient les rames sur un seul niveau, ne pouvaient fournir d'explication à ces développements. "l'énigme de la trière" semblait insoluble. Le succès majeur de l'Olympias fut de démontrer sans controverse possible qu'un navire à rames de 37 mètres de longueur, à trois niveaux, pouvait impeccablement naviguer, en concrétisant dans sa construction les données disponibles à l'heure actuelle sur ce qu'était une trière de l'époque. Elle nous permit aussi de conclure que le nom de "trière" s'appliquait à un bâtiment ayant trois rangs de rames continus de la proue à la poupe sur chaque bord. Cette conclusion permit à son tour de comprendre ce qu'étaient exactement les nouveaux types de navires apparus au durant le VIe siècle av. J.C., avec l'introduction de la pratique consistant à faire asseoir plusieurs rameurs par rame, les hémiolia, trihémiolia, et ceux jusqu'à 4, 5, 6 jusqu'aux monstres de 40 rameurs, tout en gardant toujours en tête la remarque de W. Tarn qu'aucun bateau de guerre de plus de 10 rameurs par rame ne fut jamais utilisé en combat.

Quelles que soient les modifications de détail dans le concept de l'Olympias qui seraient jugées nécessaires après après de nouvelles discussions, de nouvelles découvertes archéologiques ou de nouveaux essais en mer, le succès de l'expérience archéologique réalisée ( c'est à dire d'ouvrir la voie à un travail ultérieur sur toute la gamme de navires de guerre antiques ) ne peut être nié."

Selon le dr. John Coates, le compte-rendu des campagnes d'essais de l'Olympias à mit en évidence le fait que la "prise en main" de cette nage par les rameurs s'est faite après un court entraînement, qu'un espace de deux coudées ( 888 mm ) entre deux rameurs était trop restreint, que les ligaments de rames devaient êtres nécessairement en cuir vert à condition qu'il reste à sec, que les rames et leurs manchons devaient êtres constamment lubrifiés pour être efficaces, ces rames devant êtres aussi légères tout en ayant la meilleure flexibilité, et qu'avec 45 coups d'aviron/minutes, la puissance maximale était atteinte. Mais aussi, il démontra que, modifié selon ces enseignements, l'Olympias remanié pourrait dépasser la vitesse maximale atteinte et soutenue pendant 24 heures ( 7.5 noeuds ), pour atteindre 9.5 noeuds, ce qui était véritablement indépassable. Enfin, les rameurs devaient impérativement s'asseoir sur un coussin confortable, êtres protégés du soleil, boire énormément par temps chaud, surtout pour les Thalamiens ( rang inférieur ) manquant d'air. Concernant le vaisseau, il fut démontré également que les avirons antiques étaient parfaitement efficace et que le navire virait de bord facilement, n'offrait pratiquement pas de prise au vent qui ne joue sur ses performances, mais qu'il pouvait, du fait de sa faible largeur, donner de la bande. En navigation de haute mer, la voile paraissait suffisamment efficace pour propulser le navire à 4-5 noeuds par vent oblique, et en cas de vent faible, le surcroît de puissance obtenu à la rame se traduisait par des vitesses de 6 noeuds sans pour autant épuiser les rameurs. en cas de vent debout, il était impératif de manoeuvrer le bateau à la rame pour l'abriter ou caboter en endroit moins venté, mais dans ce cas la vitesse maximale ne dépassait pas 3 noeuds, l'effort épuisant l'équipage." ( Extrait des dossiers d'archéologie, N°183, 06/1993 ).

 
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