Marine Française 1947-1960

La marine Française en 1947-60: Un membre important de l'OTAN

Le porte-avions Foch, Operation Dragon hammer 1992
La Marine Française de la premiere periode de la guerre froide (1947-1960), loin de l'inaction, à été très tôt engagée dans deux conflits majeurs de son histoire, deux guerres de tentative de maintien de son vieil empire. A chaque fois la menace communiste à été l'enjeu principal, le ferment de l'indépendance, et la France reçut le soutien matériel et technique des USA et de la Grande-Bretagne, la IVe république s'inscrivant de facto dans le camp de l'ouest. Mais les moyens manquaient cruellement, et la plupart des unités majeures étaient datées de 1925 à 1936. Par conséquent pour faire face à ses besoins immédiats elle fit appel aux alliés et reçut un certain nombre d'unités majeures, complétant ses effectifs par les prises de dommages de guerre, Allemandes et Italiennes. Cette flotte bigarrée et vieillissante, cauchemar de logistique et de maintenance, fut engagée dans deux épreuves dans lesquelles elle joua un rôle majeur:

La guerre d'Indochine (1945-1954), poursuivie par la guerre du Vietnam du côté Américain, avant de s'achever avec les affres de la "révolution" des Khmer rouges au Cambodge fut suivi par La guerre d'Algérie (1954-1962), symbole encore plus clair de la guerre de décolonisation (que connurent également Belges et Portugais en Afrique) s'acheva sur des principes radicalement nouveaux posés par De Gaulle quand à la politique de défense de la France.

En tant que pays sans empire, la France était considérée avec bienveillance comme un des vainqueurs de la dernière guerre mondiale, bénéficiant de son siège permanent à l'ONU, et membre toléré du "club nucléaire", précédé en cela par la Grande-Bretagne, nourrie de technologies américaines, et de l'autre bord l'Union Soviétique. De Gaulle à considéré trés tôt, retirant la France des institutions de l'OTAN, que l'"indépendance nationale" passait par la dissuasion nucléaire et était en soi sa meilleure garantie de survie, sans être inféodée au parapluie nucléaire Américain. C'est de cette politique que découle la marine Française des années 1960-1990.

Enfin, durant la crise de Suez (1954), la France fit une présence remarquée aux côtés de la "Royal Navy", comme cent ans auparavant lors de la guerre de Crimée, pilonnant les forces Egyptiennes et faisant usage de ses avions embarqués.

I- La "Royale" au sortir de la seconde guerre mondiale (1945-46):

Le destin de la "Royale" durant les années noires fut des plus funestes. Moins du quart des unités survécurent à la tourmente terrestre et à la fidélité de la majeure partie des officiers à Vichy et à sa politique attentiste voire hostile aux alliés. De ce fait seul un petit nombre d'unités (mais de belles, comme le Richelieu, les croiseurs Montcalm, Suffren, Georges Leygues...) passa du côté allié et les FNFL sauvèrent l'honneur dans les trois dernières années de la guerre. De plus ils reçurent de la part des USA un certain nombre d'unités mineures. En 1945, la "Royale" était loin de son tonnage d'avant-guerre:

-1 Navire de Ligne:

Il lui restait encore 1 navire de ligne, le Richelieu, un dinosaure comparable à ceux déployés encore par les USA et la Grande-Bretagne, et le Jean Bart, achevé à 77% et remis ensuite en sommeil en attendant une reconstruction fort tardive. Il eut l'honneur d'être le dernier cuirasse "moderne" en service en Europe et une carriere courte s'achevant en 1970. Elle disposait aussi du Béarn, son unique ex-porte-avions, et qui servit de transport d'avions durant la majeure partie du conflit, finissant comme navire atelier à la base des sous-marins de Toulon.

-9 Croiseurs:

En matière de croiseurs, elle conservait encore (pour quelques années) le Suffren, le Duquesne, le Tourville et le Duguay-Trouin (tous atteints par la limite d'âge), et les plus modernes Emile bertin, Jeanne d'Arc, mais surtout les trois "La Galissonnière" dont le Montcalm, le Gloire et le Georges Leygues. Enfin, deux coques de croiseurs légers inachevés gisaient dans les ports capturés, indemnes des sabotages et de l'usure. Elles seront achevées sous la forme de deux croiseurs "classiques" mais à vocation antiaérienne.

-8 Destroyers:

La France avait disposé sous son drapeau des plus puissants destroyers du monde. Il lui restait de cette flotte, victime à Toulon comme en Algérie de la ligne politique Vichyssoise, quatre bâtiments de la classe "Le Fantasque", le Le terrible, Le malin, Le Fantasque et Le Triomphant. Cette flottille (ces derniers avaient d'ailleurs étés reclassés comme "croiseurs légers") fut rapidement complétée en 1946 par 5 destroyers ex-Allemands (Marceau, Hoche, Kléber, Desaix, le cinquième étant dans un tel état qu'il fut cannibalisé pour entretenir les autres).

-7 Torpilleurs:

Outre les rares survivants de son ancienne classe La Melpomène (1934-38), ajoutés aux survivants de ses "torpilleurs" (en fait detroyers légers) Tigre et Albatros, devenus ravitailleurs, elle reçut en 1946, 5 torpilleurs ex-Allemands (Alsacien, Lorrain, Dompaire, Bir Hakeim et Baccarat). Cette catégorie navale était désormais totalement périmée.

-12 Submersibles:

Elle disposait encore de sa vaste flotte de 1939, de 7 unités célèbres et auréolées de succès, dont le Casabianca et le Rubis, maintes fois décorés, mais aussi l'Archimède, le Glorieux, le Centaure, de 1500 tonnes et comparables aux "Gato" Américains, et la Junon, l'Iris qui comme le Rubis étaient plutôt côtiers. A cette flotte désuette s'ajoutaient d'anciens U-Bootes, les ex-U123, 471, 510 et 766, classiques et rebaptisés Mille, Laubie, Blaison et Bouan, et le révolutionnaire U2518, devenu sous son nouveau pavillon le Roland Morillot. Il s'agissait de l'un des raraes types XXI épargnés par les bombes alliées, et qui inspira fortement les conceptions en matière du sous-marins Français par la suite. Il faut signaler aussi que quelques unités de la classe Aurore en construction en 1939-40 furent achevées aprés la guerre sous de nouvelles techniques inpirées par le Morillot.

-12 Frégates:

Type plus moderne de navire spécialisé dans la lutte ASM, les Frégates Françaises furent d'anciennes unités des FNFL qui firent un long service: Il s'agissait des ex-Américains (type GMT ou Canonn) de la classe Algérien (5 unités), et des ex-Britanniques (6 unités du type River), de la classe L'Aventure. Plus tard, en 1950, 8 autres destroyers d'escorte ex-Américains rejoignirent le pavillon tricolore. (Classe Arabe, v. plus loin).

-20 Avisos:

Il y avait les anciens ravitailleurs d'hydravions d'avant-guerre, achevés pour le compte de la Kriegsmarine, de la classe Sans peur, deux "avisos hydrographiques". Il y avait aussi et surtout les trois ex-avisos coloniaux, Dumont d'Urville, Savorgnan de Brazza et La Grandière, et les 15 unités survivantes des classe Elan et Chamois datant de 1938-42 et rétrogradés comme avisos de seconde classe.

-114 Divers:

En 1946, 15 dragueurs de mines ex-Allemands furent transférés, s'ajoutant à 30 ex-Américains type YMS, dont des FNFL. plus modernes, ces derniers restèrent beaucoup plus longtemps en service actif. A cela s'ajoutaient 30 chasseurs de sous-marins type PC, transférés aux FNFL en 1944 et désignés comme "escorteurs", ce dont ils n'avaient pas le rang ni la capacité, ainsi que 49 chasseurs du type SC à coque en bois.


La "résolue", future Jeanne d'Arc, en 1964. (cliquez p. agrandir)

II- La Guerre Froide: La marine Francaise en 1947-60:

La flotte Française reconstituée se trouva renforcée aux cours des années 50 de plusieurs type d'unités, celles acquises (ex-alliées comme ses porte-avions, et ce dès 1946; ou ex-Italiennes comme les deux Guichen); celles transformées (comme le cuirassé Jean Bart et les croiseurs De Grasse et Colbert); et celles construites (comme les PA Clémenceau, les destroyers classe Surcouf et Duperré et les frégates classe Le Corse ou Le Normand). Toutefois les Clemenceau ne rentrent pas dans le décompte de 1960 (Lancées en 1957-60 mais achevés en 1961-63.). A leur place on trouvait encore le vaillant Arromanches, les Lafayette et Bois Belleau, et le Dixmude.

Durant cette première partie de la guerre Froide, la politique maritime Française s'apparenta d'abord à un maintien de ses possessions coloniales. Elles sous-entendait une flotte de haute mer comparable à celle de la Grande-Bretagne ou des USA, toutes proportions gardées, et devait contenir la hiérarchie traditionnelle du groupe d'assaut centré autour du porte-avions.

Effectifs 1960:

Porte-avions:
  • Dixmude
  • Arromanches
  • Bois Belleau
  • Cl. Lafayette
  • Classe Clémenceau
  • Navires de ligne :
    Jean Bart Croiseurs
    • Cl. La galissonnière
    • De Grasse
    • Colbert
    Destroyers:
    • Cl. Surcouf
    • Cl.Duperré
    • La Galissonnière
    Frégates:
    • Cl. Arabe
    • Cl. Le Corse
    • Cl. Le Normand
    • Cl. Cdt Rivière
    Sous-marins:
    • SA Cl. Saphir
    • SA Cl. La Créole
    • SA Cl. Narval
    • SA Cl. Aréthuse
    • SA Cl. Daphné
    • SA Cl. Gymnote
    Divers:
    • SM. expérimental Gymnote
    • CSM cl. Le Fougueux
    • DM cl. Aconit
    • DM cl. Sirius
    Navires d'Assault
    • NDC cl. Trieux
    • NA cl. Ouragan

    Porte-avions


    Navires de ligne

    Richelieu

    Jean Bart



    Frère jumeau du Richelieu, le Jean Bart était terminé à 77% lorsque les troupes Allemandes arrivèrent en vue du port de saint Nazaire. Afin d'éviter d'étre capturé, le Jean Bart, qui venait d'étre lancé, fut conduit par un équipage de fortune en Afrique du Nord, à Casablanca. Là, le manque de moyens empécha la poursuite des travaux mais son unique tourelle de 380 mm battait les abords du port. C'est ainsi qu'il faillit repousser le débarquement des troupes américaines dans cette ville lors de l'opération Torch en novembre 1943, et qu'il fut sérieusement canonné et endommagé. Conduit après la guerre en métropole pour réparations et achévement, il fut consigné le temps que les plans soient prêts. En 1945, la stratégie navale avait largement évoluée, et son rôle fut entiérement repensé. Il conserva ainsi son armement principal, mais ses équipements électroniques et des canons AA allaient en faire un bâtiment antiaérien capable de couvrir la flotte et de mener des bombardements côtiers tout en pouvant se passer d'escorteurs. Il fut lancé en 1947, achevé en 1949, mais son armement antiaérien définitif ne fut opérationnel et fixé qu'à l'hiver 1951-52.

    Sa puissante DCA comprenant 24 canons de 100 mm et 26 de 57 mm obligea les ingénieurs à le stabiliser en le dotant de deux ballasts latéraux massifs, qui firent passer la largeur à 33,5 mètres et son déplacement à 42 800 tonnes, bien plus que le Richelieu, qui lui resta presque inchangé aprés-guerre. Si le Richelieu servit en Indochine, le Jean Bart fut envoyé à Suez lors de la crise du même nom, y effectuant des bombardements côtiers. En 1960, il entama une carrière de navire école, et en 1968, de navire sans affectation précise, en réserve à Toulon jusqu'à sa radiation en 1970 et sa démolition. Ce n'était pas le dernier cuirassé en service (Les Iowa ont eu une carrière bien plus longue), mais ce fut le dernier achevé. Il fut terminé en effet deux ans aprés le Vanguard Britannique, autre "last but not least".

    Déplacement: 42 800t, 51 000t PC.
    Dimensions: 248 x 33.5 x 8,40m
    Propulsion :2 turbines, 6 chaudiéres , 130 000 cv. et 34 Noeuds max.
    Equipage: 1560
    Electronique embarquée ?
    Armement: 8 canons de 380 (2x4), 9 canons de 152 (3x3), 24 canons AA 100 (24x1), 26 de 57 (13x2).
    Blindage: 400 mm

    Sous-Marins

    SA classe Agosta (1974-76)

    Aprés une série d'excellents sous-marins dérivés du type XXI Allemand, les Narval, puis les Aréthuse, et enfin les Daphné, qui connurent un succès certain à l'exportation, les Agosta appartenaient à une toute nouvelle génération, bien plus moderne, conçue en parallèle avec les SNA classe Rubis, les plus petits SNA du monde. Leur double coque n'était guère plus vaste, et la partie immergée hébergeait les réservoirs de mazout, d'eau potable, les antennes, et naturellement les ballasts. Cette coque était particulièrement soignée, nettement plus hydrodynamique que les Daphné, réduisant leur signature acoustique, avec 16 ans d'écart en génération. Ils étaient en outre plus rapides en plongée, avec un bien meilleur rendement de batterie (le double) leur donnant un bonne autonomie et un système d'"overboost" leur donnant la possibilité de filer à plus de 20 noeuds en cas d'urgence. Par ailleurs, ils avaient un mode de propulsion totalement silencieux une leur permettaient une approche discrête à 3,5 noeuds.

    Les Agosta bénéficiaient enfin d'une électronique soignée, avec des systèmes d'�coutes DUUA actifs et DSUV passif, et une antenne tractée. Ils n'avaient que quatre tubes lance-torpilles, mais les probabilités de coups au but étaient proches des 100% grâce à leurs guidage acoustique par câble. Par ailleurs ces tubes capables de lancer de torpilles standards de 533 mm, pouvaient également lancer des tubes de 550 mm, contenant notamment un missile exocet encapsulé, et ce depuis les essais du Bézéviers, ce système étant adopté ensuite sur les trois autres (Agosta, La Praya et Ouessant). Les Agosta ont convaincu de leur pertinence à un coût relativement réduit, et ont séduit d'ores et déjà l'Afrique du sud en 1976, ont bénéficié finalement au Pakistan, et 4 pour l'Espagne, sous licence.

    Deplacement & Dimensions: 1490t, 1740t PC 67,6 x 6,8 x 5,5 m
    Propulsion: 1 hélice, 2 diesels SEMT-Pielstick, 1 mot. elect., 3600/4500 cv. et 12/17,5 Noeuds max.
    Equipage: 1560
    Armement: 4 TLT 550 mm proue, 20 torpilles L5/miss. MM39 exocet.